LVNAC - Massacre des berges du Mazou
Massacre des berges du Mazou
(commune de Nannay)
C'était un de ces coins charmants que nous offre la Nièvre, une petite rivière (le Mazou) dans l'écrin de verdure de ses berges qui joue un rôle majeur dans la composition de ces paisibles paysages (qui allient terre et eau) que nous aimons.
Les photos qui suivent parlent d'elles-mêmes. Elles nous sont transmises par le propriétaire du moulin de Janlard, situé à deux pas de ce lieu de massacre. Un spectacle qui laisse sans voix et révèle chez l' auteur de ces faits, une absence absolue de respect pour la nature et la vie qu'elle abrite, pour le regard des autres qu'il s'agisse de ses voisins ou des promeneurs et enfin pour sa profession (agriculture) par l'image désastreuse qu'engendre ce type de comportement. Enfin priver une rivière de sa végétation rivulaire c'est lui porter directement atteinte et pour de nombreuses années. Pour le paysage aussi la période de cicatrisation sera longue !
Entretien des cours d'eau privé que dit la loi ?
Le Mazou est un cours d'eau privé. Son lit appartient aux propriétaires riverains (la limite séparative se situe au milieu du lit de la rivière). Ils doivent supporter l'entretien du lit et des berges. Ici l'agriculteur était le seul riverain du Mazou. Le code de l'environnement précise la définition de l'entretien régulier que doit réaliser le propriétaire riverain : «enlèvement des embâcles, débris et atterrissements, flottants ou non, élagage ou recépage de la végétation des rives». Cet entretien a pour objet de maintenir l'écoulement naturel des eaux, d'assurer la bonne tenue des berges, de préserver la faune et la flore dans le respect du bon fonctionnement des écosystèmes aquatiques et dans un objectif de maintien de la biodiversité.
Cet entretien régulier par les riverains prévu par la loi, on le voit doit être une intervention légère, à ce titre elle peut se faire sans autorisation particulière au titre de la législation sur l'eau.
Mais ce qui a été fait ici n'est en rien un entretien c'est une destruction perpétrée à l'aide d'un énorme engin, sur près de un kilomètre le long du Mazou mais également sur le canal d'amenée d'eau du moulin qui n'est pas considéré comme le cours d'eau ...
On est très loin des pratiques d'une gestion des berges respectueuse de l'environnement et des ressources que représentent ce milieu aquatique.
Au début du siècle notre société rurale était directement concernée par l'état de la rivière et de ses berges (préservation contre les inondations, ressources eau, matériaux de construction, bois de chauffage, pêche, navigation), son entretien régulier s'imposait naturellement et il se faisait manuellement ...
Après la seconde guerre mondiale, la France se reconstruit, s'urbanise, s'industrialise, développe une agriculture à haut rendement. Nos rivières et leur végétation considérée comme gênante paieront un lourd tribu lors des travaux d'aménagement, de curage sévère, de rectification de leur lit, opérations destinées à faire circuler l'eau le plus rapidement possible pour évacuer les crues !.
Par ailleurs lié à notre nouveau mode de vie, la disparition des usages des berges ont conduit à ignorer celles-ci puisque inutiles à nos modèles de développement. Les berges seront alors le lieu de nombreux désordres, disparition ou développement anarchique de leur végétation, érosion, destabilisation, dépôts multiples, pollutions, dégradations paysagères ...
Dans les années 95 une prise de conscience se développe pour enrayer ces dommages. La loi eau de janvier 1992, stipule que «l'eau fait partie du patrimoine commun de la nation». Elle implique une gestion équilibrée de la ressource eau dans le respect du fonctionnement naturel des écosystèmes.
La végétation des berges remplit de multiples fonctions qui participent à l'équilibre global de l'écosystème eau courante que constitue une rivière.
Fonctions de la végétation des berges
La berge est un lieu de biodiversité végétale et animale :
Zone de transition entre deux milieux, terre et eau, la berge abrite un grand nombre d'habitats et de niches écologiques. Sa végétation qui s'étage en fonction du taux d'humidité et de la proximité de l'eau aulnes, saules en bordure, strates arbusives, herbacées…constitue un corridor de déplacement et d'échanges entre les communautés, favorable pour s'alimenter, se cacher, (oiseaux, mammifères, amphibiens ...)
La berge participe au fonctionnement du milieu aquatique :
La végétation des berges est favorable à la faune aquatique. Les racines des arbres, les branches basses, l'apport de matière organique par les feuilles, les débris ligneux constituent pour les poissons et les invertébrés des abris, des supports de ponte, des gardes- manger ...
La végétation riveraine par l'ombrage qu'elle apporte joue sur la température de l'eau laquelle intervient directement sur le cycle de développement des organismes aquatiques (une eau fraîche par exemple sera favorable aux salmonidés).
En régulant la quantité de lumière qui pénètre le cours d'eau la végétation des berges peut limiter le développement des végétaux aquatiques
La végétation stabilise les berges. Ce rôle est connu depuis très longtemps. Les berges du canal du midi ont été consolidées au 17ème siècle par la plantation d'iris ... Le renouveau des techniques végétales appliquées au problème de la stabilisation des berges date des années 1950 avec le développement du génie végétal.
La végétation réduit la puissance du courant lors des crues.
Elle joue un rôle de filtre, par son système racinaire vis-à-vis des pollutions diffuses d'origine agricole qui transitent vers les cours d'eau par infiltration ou ruissellement. L'efficacité de cette fonction est en relation directe avec la largeur de la formation végétale riveraine.
Enfin il n'est que de se reporter aux tristes photos jointes à cet article pour comprendre la fonction paysagère de la végétation des cours d'eau. Elle valorise la berge, par ses formes, sa diversité, ses changements saisonniers. Dans un paysage cette végétation verticale, signale la présence du cours d'eau dans la vallée. La végétation est un élément essentiel d'un cours d'eau, on voit combien sa suppression dénature complètement le paysage. Et sans elle le Mazou en cet endroit n'est plus une rivière, l'eau a perdu tout son pouvoir attractif.
Au regard de l'importance des formations végétales riveraines au sein des écosystèmes d'eau courante, toute opération d'entretien doit être réfléchie et menée en pensant aux répercussions sur l'avenir du cours d'eau et de sa berge.
Un aménagement respectueux de la vie du cours d'eau est souvent celui ou l'on ne décèle pas qu'il y a eu intervention de l'homme… ici pas d'erreur c'est la désolation !
J. Thévenot
Le moulin de Janlard
un cours d'eau traité comme un fossé!
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