LVNAC - Les zones humides : patrimoine irremplaçable
Les zones humides : patrimoine irremplaçable
Le 2 février, comme chaque année depuis 1997, a été célébrée la journée mondiale des zones humides, en commémoration de la signature le 2 février 1971 de la convention de Ramsar (ville iranienne) qui a jeté les bases d'une sauvegarde des zones humides, notamment pour protéger les oiseaux d'eau. Ratifiée à ce jour par 159 Etats, elle labellise plus de 1.800 sites à travers le monde, d'importance internationale au point de vue écologique, botanique, zoologique, hydrologique, limnologique, couvrant plus de 170 millions d'hectares.
Au titre de cette convention, que la France n'a signée qu'en 1986 … 36 sites français (dont 4 en Outremer) sont inscrits comme zones humides d'importance internationale : la Camargue, la baie du Mont St Michel, la Brenne, la baie de Somme, la Champagne humide, les Dombes etc…Ce sont les Etats qui désignent leurs zones humides d'importance internationale qu'ils s'engagent à conserver.
Ces sites bénéficient donc d'une protection mais il y a toutes les autres zones humides moins prestigieuses, comme les tourbières (ou sagnes), les mares, les étangs, les prairies humides et inondables, gravières, forêts alluviales … qui ne cessent de régresser sous la pression des aménagements (urbanisation, routes), de l'agriculture intensive : drainages (subventionnés…), irrigation, mises en culture, pollutions, des remblaiements, des extractions de granulats, des aménagement des cours d'eau (barrages, digues, recalibrage …). En France entre 1960 et 1990, la moitié des zones humides ont disparu, elles figurent encore aujourd'hui parmi les milieux les plus menacés.
Il existe plusieurs types de zones humides : tourbières, marais des têtes de bassin versant; zones humides fluviales (bras secondaires, bras morts alimentés par la nappe …); zones humides littorales; grandes zones humides continentales (Sologne, étangs de la Brenne …) si chacune a un fonctionnement propre, toutes les zones humides à des degrés divers ont des fonctions communes, susceptibles de rendre de nombreux services à la collectivité … ce qui justifie que les Etats prennent toutes les mesures nécessaires pour les préserver.
Les zones humides jouent un rôle capital dans le cycle de l'eau :
- Elles jouent un rôle important dans l'épuration de l'eau :
Les zones humides sont de véritables filtres capables, grâce aux végétaux qui y puisent leur nourriture, de fixer les matières en suspension véhiculées par l'eau et les surplus de produits phytosanitaires et d'engrais - nitrates, phosphore- drainés sur les bassins versants* contribuant ainsi à réduire les risques d'eutrophisation.
Elles participent à la protection des nappes souterraines en épurant les eaux de ruissellement avant qu'elles ne les rejoignent et à l'amélioration des eaux superficielles prélevées. Par leur capacité de stockage, les zones humides constituent des réserves d'eau de qualité pour la distribution d'eau potable (capacité des zones humides de la Saône : 53 millions de m3 !).
Cette efficacité contre les pollutions diffuses agricoles dépend évidemment de la capacité des zones humides à intercepter les écoulements de surface et souterrains issus des parcelles environnantes. L'effet filtre sera optimal en présence d'un maillage serré de zones humides et localisé entre les zones cultivées et la rivière.
Ce rôle est évidemment remis en cause par tous les aménagements qui perturbent le fonctionnement naturel de ces zones dans le but notamment de réduire les hauteurs de submersion et d'accélérer l'évacuation des eaux pour favoriser les cultures.
- Elles contribuent à la régulation des débits des cours d'eau :
A l'échelle d'un bassin versant le comportement des zones humides des plaines alluviales peut être assimilé à celui d'une éponge. Lorsqu'elles ne sont pas saturées en eau, elles retardent le ruissellement des eaux de pluie et leur transfert immédiat vers les rivières et fleuves situés à l'aval. Une étude relative à la Charente a montré que du fait des aménagements supprimant des zones humides, une goutte d'eau parcourt en deux jours la distance préalablement parcourue en deux semaines.
Lors des crues, l'épanchement des eaux dans les zones humides contribue à l'écrêtement des pointes de crues donc à l'atténuation de la gravité des débordements sur les zones habitées.
Tout le combat historique du comité Loire Vivante a porté sur ce point essentiel sauvegarder des zones d'expansion des crues à l'amont des zones urbanisées pour bannir les constructions de barrages et de digues censées lutter contre le risque inondation.
De plus la restitution des eaux stockées en période des hautes eaux ou d'inondation se fait de manière progressive, les zones humides contribuent donc à retarder et à réduire l'intensité des étiages estivaux des cours d'eau comme des nappes phréatiques.
Les zones humides constituent des réservoirs de biodiversité :
En France 30% des espèces végétales remarquables et menacées vivent dans les zones humides. Près de 50% des espèces d'oiseaux dépendent de ces zones et 2/3 des poissons consommés s'y reproduisent ou s'y développent. Les zones humides sont d'une importance majeure pour trois des trente quatre espèces de chauve-souris qu'héberge la France, mais aussi pour le vison d'Europe, la loutre, le campagnol amphibie, le castor d'Europe … sans oublier les espèces plus communes que l'on peut observer dans la moindre petite mare : insectes (3.000 espèces aquatiques la plupart au niveau de leur stade larvaire -éphémères, odonates-…), les batraciens, les mollusques, des reptiles (couleuvre à collier, lézard vivipare, cistude …).
Elles sont des lieux d'alimentation, de reproduction, de repos, et de refuge. Par exemple les milieux annexes des cours d'eau (bras) jouent un rôle d'abri pour de nombreuses espèces piscicoles lors des crues ou des pollutions accidentelles. Elles y déposent leur œufs : les eaux calmes et chaudes sont propices au développement des embryons et au grossissement des alevins.
La valeur biologique des zones humides, si modestes soient-elles n'est plus à démontrer. Des plans de sauvegarde, impliquant tous les acteurs concernés, sont mis en place sur tout le territoire : citons le «Réseau mares de Bourgogne» qui travaille sur l'amélioration des connaissances, la mise en place d'actions de préservation et la sensibilisation des professionnels et du grand public à la protection de ces milieux.
www.sitesnaturelsbourgogne.asso.fr et www.bourgogne-nature.fr
Les zones humides sont le support de nombreuses activités économiques :
Les zones humides en raison des ressources qu'elles abritent occupent une place importante dans les activités humaines à travers de petites productions locales, empreintes de la spécificité du territoire qui sont de plus en plus valorisées (label, marque, certification) en tant qu'inscrits dans une démarche de qualité et de respect de l'environnement. Ces productions gage de reconnaissance des zones humides assurent aussi leur conservation.
Nous citerons la récolte du sel (marais de Guérande entretenus par les paludiers),la production de l'osier, des roseaux (toits de chaume), élevage de la race bovine maraîchine (Vendée, Charente maritime, Deux Sèvres), agneaux des prés salés des baies de Somme, huîtres Marennes Oléron affinées dans le marais, riz de Camargue, pêche professionnelle (lac de Gran Lieu)…..
Les zones humides font partie du patrimoine paysager et culturel et constituent un pôle d'attraction important : Mont St Michel, Camargue, Brière, Guérande. Ce tourisme est à la fois une chance et un risque pour ces lieux fragiles en cas de gestion non appropriée des flux de visites.
A côté de cette fréquentation de masse un tourisme «vert» plus respectueux de l'environnement se développe dans ces espaces naturels : parcs ornithologiques Ecopoles, réserves, centres de découvertes, sentiers d'initiation etc … le tourisme ornithologique qui se pratique hors saison au printemps et à l'automne occupe une place importante dans des territoires qui seraient peu fréquentés (la Brenne, la Champagne humide). Enfin les loisirs sont présents dans ces sites à travers la pêche, la batellerie, la chasse … Il s'agit de réussir à concilier les obligations de préservation de la fonctionnalité environnementale de ces zones tout en assurant la pérennité d'activités liées à ces milieux.
Dans un article suivant nous tenterons d'inventorier les moyens publics mis en œuvre pour la protection de ces milieux et d'en analyser l'efficacité ... Malgré un ralentissement de leur régression depuis les années 1990 elles restent un des milieux les plus dégradés tant en ce qui concerne leur superficie que leur état de conservation. La situation la plus critique étant celles des zones de prairies humides, des landes et des annexes fluviales.
Jacqueline Thévenot
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