Les engins motorisés n'ont pas leur place dans les milieux naturels
LES ENGINS MOTORISES N’ONT PAS LEUR PLACE DANS LES ESPACES NATURELS
Quel est le promeneur à pied ou à cheval, le joggeur, le vttiste qui n’a jamais croisé ou été dépassé sur un sentier de randonnée ( ou sur les grèves de Loire …) par des engins motorisés de loisirs qui n’ont rien à faire en ces lieux. Au premier rang figurent aujourd’hui les quads qui depuis leur homologation supplantent les pratiques traditionnelles 4x4, moto dite « verte ». Leur développement à partir des années 2000 a conduit la ministre de l’écologie à sortir en 2005 une circulaire destinéee aux élus, aux préfets et autorités administratives en charge des espaces naturels leur demandant d’appliquer très fermement l’interdiction générale de circulation des quads et autres engins motorisés dans les espaces naturels en dehors des voies ouvertes à la circulation publique, inscrite dans la loi du 3 janvier 1991- époque où les quads n’existaient pas encore- (loi Lalonde appelée loi 4x4- article L.362-1 et suivants du Code environnement) très mal appliquée alors et sans doute guère mieux aujourd’hui compte-tenu de l’expansion de ces pratiques.
Que les relations entre les amoureux de la nature pour sa beauté, son calme, de son air pur… et ces « sportifs du volant » casqués, bottés, pressés, bruyants et pollueurs, soient difficiles, n’a déjà rien d’étonnant. Il faut ajouter, raison meêm de la loi, le danger pour les autres usagers et les impacts environnementaux importants qu’engendre la pratique sauvage et illégale des sports motorisés en dehors des voies publiques autorisées ( voire de tout chemin…) : érosion des sols maximale en hiver et au printemps (pentes forestières, berges des cours d’eau qui entraîne un colmatage du ruisseau destruction de sa faune et de sa flore), tassement des sols dû aux passages répétés avec possible destruction de plantes protégées ou caractéristiques du milieu (notamment dans les zones humides), dérangement de la faune sauvage qui peut porter atteinte à la reproduction (oiseaux –abandon des couvées-, mammifères mort par stress), et enfin la dégradation des chemins…d’autant plus importante que les terres sont meubles et détrempées (régal de certains de ces pratiquants…).
Ces impacts sont contestés notamment par le CODEVER (collectif de défense des loisirs verts www.codever.fr créé en 1987 puissant loby aujourd’hui qui souligne en revanche les atouts de ce loisir : « maintien de l’ouverture des chemins peu fréquentés grâce aux passages réguliers et aux pratiquants qui « mettent généralement leurs balades à profit pour dégager les arbres tombés à terre, élaguer les branches basses, supprimer les ronces trop envahissantes... »,( ??) retombées économiques locales, animation du monde rural…épanouissement de ses adeptes ». Je vous invite à aller sur Youtube ( ou dailymotion) et de taper « quad Morvan » pour avoir une idée des méthodes d’épanouissement de ces quadistes tellement respectueux du Morvan, de la nature et de la réglementation. La seconde vidéo s’intitule « sortie quad Brassy Morvan » , on y voit un véhicule rouler dans une rivière , en plein Parc du Morvan !.
Le Codever se targue de faire de la pédagogie (il décerne un label « Codever attitude » pour les randos organisées)… auprès de ses adhérents mais dénonce par ailleurs « une répression aveugle et systématique qui crée des délinquants et ne résout pas les difficultés de cohabitation. Au contraire ! Elle ne fait que dresser les français les uns contre les autres, selon qu’ils soient motorisés ou non. En outre, cette répression coûterait très cher au contribuable (mobilisation d’hélicoptères, d’autos et de motos, de dizaines de gendarmes et agents de l’ONCFS et de l’ONF) pour des opérations aux résultats très contestables ».
Les contrôles avec verbalisation ont lieu essentiellement lors d’opérations coups de poing, (à but répressif et pédagogique) menées par l’ONCFS, l’ONEMA et la gendarmerie à l’occasion par exemple de week-end prolongés à des verbalisations –(cf dans le canton de Lormes JDC 12/11/14 18 contraventions). Le sous- préfet à cette occasion a incité les agents à faire preuve de rigueur mais aussi de discernement… « en forêt on peut se perdre…le doute doit donc bénéficier à nos concitoyens… » remarque plutôt déplacée à notre avis de la part d’une autorité étatique garant de la bonne application de la loi.
Les associations environnement on s’en doute ont un autre point de vue que le Codever (et la préfecture) et dénoncent au contraire les dégradations de l’environnement liées au non respect de la loi en raison de l’insuffisance des contrôles et des sanctions contre les récidivistes d’ activités de loisirs qui de plus vont à contrecourant des préoccupations du moment, réduction du gaspillage des énergies fossiles et des émissions de gaz à effet de serre ; elles dénoncent également une implication insuffisante des professionnels pour un strict respect de la réglementation.
Que dit la loi de 1991 ? En vue d'assurer la protection des espaces naturels, la circulation des véhicules à moteur est interdite en dehors des voies classées dans le domaine public routier de l'État, des départements et des communes, des chemins ruraux et des voies privées ouvertes à la circulation publique des véhicules à moteur. ». Hors ces voies on est en milieux naturels, la circulation des véhicules à moteurs y est strictement interdite (pré, forêt, pâture, cours d’eau, milieux humides…) et constitue une contravention passible d’une amende de 1500 euros (3000 en cas de récidive)..
.Ne sont pas concernés par cette interdiction les véhicules des services publics (police rurale, lutte contre les incendies, surveillance, entretien…) ceux utilisés par les propriétaires sur les terrains leurs appartenant et leur ayant-droit.
S’agissant de le notion de voies ouvertes à la circulation publique que ne définit ni la loi ni le règlement, les tribunaux considèrent que ce sont des voies carrossables manifestement praticables par un véhicule de tourisme non spécialement adapté au « tout terrain ». Le Codever refuse la notion de carrossabilité qui selon lui est une interprétation abusive de la loi (cf une pétition www.codever.fr/index.php/signez-la-petition intitulée « MOI AUSSI ! Je protège la nature, j'entretiens mon cadre de vie et je respecte les autres. HALTE A LA REPRESSION AVEUGLE et SYSTEMATIQUE des ADMINISTRATIONS »
Ne constituent en aucun cas des voies ouvertes à la circulation des quads et autres engins motorisés les sentiers de randonnée pédestre, les chemins de halage, les bandes pare-feu des massifs forestiers, les chemins de débardage, les voies vertes (réservées aux piétons et cyclistes parfois aux cavaliers) et tous les chemins carrossables qui font l’objet d’une interdiction, de la part des propriétaires riverains (chemin d’exploitation) ou de la commune (chemins ruraux).
Le Parc du Morvan, toujours à la recherche d’un compromis et qui n’a pas de compétence pour interdire ces activités a opté pour un rôle d’impulsion (sensibilisation et pédagogie) de conseil et d’assistance auprès des élus a élaboré depuis 2003 en concertation avec tous les acteurs (dont le Codever Nièvre) un code de bonne conduite intitulé « Pour une maîtrise des loisirs motorisés dans le Morvan » qui sollicite un engagement citoyen de tous les pratiquants ou organisateur (un coupon d’engagement sur le site).
Il rappelle la réglementation et le pouvoir des maires de restreindre la circulation motorisée ; le parc leur apportera une assistance juridique s’ils le souhaitent.
Les adeptes de sports motorisés sont invités au respect de la sécurité, de l’environnement, de la propriété et des autres usagers ; à s’arrêter, couper le moteur et laisser la priorité aux autres utilisateurs, piétons, cavaliers, animaux en liberté, VTT… . Il est conseillé aussi de ne pas traverser les ruisseaux, d’éviter de repasser fréquemment dans les mêmes chemins, de ne pas prendre le GR 13 (traversée du Morvan). Edicter un code de bonne conduite s’apparente à faire de la promotion pour ce type d’’activité aussi ce document rappelle t-il que les sports motorisés « ne correspondant pas aux valeurs que défend le Parc « il ne fera aucune promotion de ces loisirs dans ses supports de promotion et de communication » (cf sa charte p.53).une position de principe à mettre en parallèle avec les propos de son président Patrice Joly « on peut développer les activités de loisir motorisés mais avec toute l’attention nécessaire… » (rencontre du 24/12/2014 voir plus loin)
Mais un sondage sur des sites dédiés à ces sports révèle une référence fréquente au parc du Morvan présenté en fait un comme cadre exceptionnel pour les loisirs motorisés….Donc au final la promotion de ces sports motorisés se fait sur l’image du Parc du Morvan.
www.vezelaytourisme.com/art225-loisirs on lit « ballade aventure en 4x4 Découvrez le Morvan à bord d’un 4x4. Partez à l’aventure à travers les chemins sauvages, les forêts, les lacs et les monts granitiques du Parc du Morvan pour quelques heures ou pour une journée ». « Terrain d’aventure très varié le Parc du Morvan est également praticable en quad . Il est précisé « Les guides professionnels pourront vous conduire sur des parcours autorisés à cette pratique ».
www.cap-extreme.com -–quad moto- : « Découvrez le Morvan et ses endroits sauvages les plus reculés aux commandes de machines de différentes cylindrées et sur des circuits adaptés à tous. En pleine forêt vous découvrirez des sentiers variés avec des bourbiers, ornières, passages à guets et dévers. Maîtrise des commandes, gestion des gaz et choix des trajectoires seront au rendez-vous ». Le tout accompagné d’une vidéo montrant ces engins en circulation dans des lieux prohibés alors que la publicité pour les pratiques illégales est interdite !
www.slide-control.com dans la rubrique « Quad » annonce
« Au cœur du Parc Naturel Régional du Morvan, SLIDE CONTROL et son équipe organisent depuis plus de 20 ans vos randonnées en QUAD ».
www.bourgogne-tourisme.com/itinerances/a-moto: « Loin du trafic, les courbes tranquilles et les paysages surprenants du Parc Naturel Régional du Morvan représentent sans doute un graal pour le motard en quête de sérénité. Loin des foules, le Parc Naturel Régional du Morvan offre un caractère sauvage aux couleurs de contrées lointaines. Le Morvan à moto, c'est un peu l'Amérique ! »
Face aux dérives de certains pratiquants qui se munissent d’engins qui rappelons le sont construits pour faire du tout terrain la sensibilisation et la pédagogie auront peu d’écho.…la maîtrise de ces loisirs ne peut donc reposer que sur la répression et des restrictions de circulation plus contraignante que la loi de 1991.
La préservation des espaces naturels et la promotion d’un tourisme de nature sont deux des objectifs essentiels d’un parc naturel ; ils impliquent évidemment la maîtrise de la circulation motorisée. Et il est à craindre que les élus ( nombre d’entre eux continuant à opposer inlassablement développement économique de leur territoire et environnement et à raisonner sur le court terme) donnent la priorité à l’activité économique que génèrent ces sports motorisés ( on attend d’ailleurs qu’elle soit sérieusement évaluée au regard des impacts négatifs qu’ils peuvent engendrer notamment la dégradation des chemins ruraux) et soient donc peu enclins à aller plus loin dans la réglementation de ces loisirs, mais également de constater ou faire constater et sanctionner toute infraction aux dispositions légales et réglementaires ( alors que le maire est responsable du respect de la loi sur le territoire de sa commune…)..
La charte du Parc (2008-2019) qui traite des loisirs motorisés (p.53) frappe par son manque d’ambition au regard de sa fonction de protection du patrimoine par une gestion adaptée au milieu (tout en contribuant au développement économique et social)..
Quelques actions, information auprès de l’ensemble des acteurs du territoire (maires, pratiquants, partenaires et autres usagers), observation des pratiques, concertation avec les pratiquants, mise en place d’une stratégie sur les zones sensibles (GR13, grands lacs, sentiers thématiques de découverte) sans aucune autre précision sur la nécessité d’une réglementation plus contraignante qui exclurait toute circulation de véhicules de loisirs motorisés hors le réseau routier départemental et communal.. Rien à première vue donc de très concret qui permettrait d’encadrer les activités de loisirs motorisés dans le Parc alors que selon la loi la charte « comporte un article établissement les règles de circulation moteur sur les voies et chemins de chaque commune adhérente ». Nulle trace par exemple dans la charte d’une incitation à l’établissement sur chaque commune concernée par une circulation de véhicules moteur mal maîtrisée, d’un plan de circulation qui affiche clairement ce qui est interdit à la circulation dans les espaces naturels (sur les voies ouvertes à la circulation et hors les voies) si la sensibilité environnementale, la sur-fréquentation, la sécurité, les conflits d’usage, l’impose avec mise en place d’une surveillance et d’un contrôle du respect des interdictions. La loi donne pourtant aux maires un large pouvoir en la matière : « il peut par arrêté motivé (fortement pour éviter les contestations…), interdire l’accès de certaines voies ou de certains secteurs de la commune aux véhicules dont la circulation sur des voies ou dans ces secteurs est de nature à compromettre soit la tranquillité publique, soit la protection des espèces animales ou végétales, soit la protection des espaces naturels, des paysages ou des sites ou leur mise en valeur à des fins esthétiques, écologiques, agricoles, forestières ou touristiques » (L. 2213-4 code des collectivités territoriales, L. 362-2 code environnement). Il peut autoriser la création d’un site aménagé pour la pratique des sports motorisés.
Le Codever ça n’étonnera pas s’oppose à toute restriction supplémentaire de circulation sa devise est « protéger sans interdire ». C’est d’ailleurs la devise du collectif national des Racines et des Hommes qui demande l’abrogation des lois sur les parcs nationaux (de 1960 et 2006); il est présidé par Jean Lassalle qui mène croisade contre l’ensemble des parcs naturels (parcs nationaux, régionaux, parcs naturels marins mais aussi zone humides et Natura 2000….).
Des « rencontres sur les loisirs motorisés en Morvan » ont eu lieu en décembre 2014 organisées par le Conseil général de la Nièvre et le Parc du Morvan . Le site https://drive.google.com/folderview?id=0B4HMzNNp2xkCcUk0cnQ2YXgzS0U&usp=sharing donne accès aux seuls documents de présentation de cette rencontre mais aucune trace des propos tenus dans la discussion qui devaient déboucher sur des « propositions constructives » pour concilier ces pratiques et protection de la nature.
Si le parc du Morvan est très concerné par les sports motorisés de loisirs en milieu naturels (et qu’il serait regrettable qu’il soit identifié à cette pratique … au même titre par exemple qu’on associe l’Ardèche à la pratique du canoë !), ce phénomène touche tout le département en raison d’un patrimoine naturel encore préservé qui est une richesse pour aujourd’hui et demain. L’environnement ne cesse de s’affirmer comme préoccupation majeure des Français, une majorité d’entre eux (83%) souhaitent que la protection de la nature prime sur le développement économique, e 9 sur 10 voient dans la disparition d’espèces végétales et animales une menace pour notre survie (sondage « Fête de la Nature » OpinionWay, mars 2015 ). La nature est pour eux un lieu de ressourcement (idée d’espace, de liberté) de loisirs à travers les sports de pleine nature (souvent pratiqués en famille ou avec des amis) doux et respectueux des milieux qui font de plus en plus d’adeptes. Ils constituent une large majorité à ne pas pratiquer de sports motorisés pourquoi devraient-ils subir une situation de nuisances due à l’incivisme d’une minorité.
Et alors qu’une loi existe dont le respect garantirait dans notre nature nivernaise la tranquillité et la protection des beautés naturelles que recherchent ceux qui ont choisi d’y vivre ou d’y passer leurs vacances. Les élus de ce département ont une responsabilité majeure en ce domaine car le développement des loisirs motorisés va entraîner la recrudescence de pratiques illégales. Cela implique déjà qu’ils connaissent bien la loi pour la faire respecter. Le conseil général lui a consacré une plaquette qui leur est destinée www.cg58.fr/IMG/pdf/Guide_Motors_Espaces_Nature-112014.pdf
Si conformément à la loi du 22 juillet 1983 il a établi le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée (PDIPR) www.cg58.fr/...randonnee/plan-departemental-des-itineraires-de-promen.. et créé en 2005 la Commission départementale d’Espace Site et Itinéraire (CDSEI) www.cg58.fr/IMG/pdf/CDESI58.pdf on attend qu’il mette en place le PDIRM ( Plan départemental des itinéraires de randonnées motorisées) qui établirait la cartographie des itinéraires de randonnées motorisées conformément aux règles posées par la loi de 1991. Ces itinéraires clairement identifiés dans tout le département permettraient de maîtriser les pratiques des tout-terrain et de mettre fin aux discussions vaseuses sur la notion de voie ouverte à la circulation publique !.
Force est de constater que la Nièvre n’est pas une exception dans le non respect de cette obligation inscrite dans la loi de 1991 (donc depuis 24 ans). Il est général !. L’entretien des itinéraires inscrits au PDIRM est à la charge du département constitue vraisemblablement un frein sérieux à son établissement mais s’y ajoute évidemment la difficulté de voir aboutir la large concertation avec les lobby de tous poils qu’implique un tel plan. Qui n’a aucune chance d’être mis à l’ordre du jour de l’assemblée départementale vu la position exprimée par Mr Joly sur le développement des sports motorisés déjà dans le Parc Naturel du Morvan….alors dans le reste du département !
J. Thévenot
Bon travail du conseil départemental sur les Espaces Naturels Sensibles. Découverte des sentiers :
www.cg58.fr/la-nievre/geographie-environnement/tout-savoir
www.parcdumorvan.org/fr/Tourisme/Sports_de_nature/Loisirs_mot présente le code de bonne conduite
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