Nature et Environnement en Nièvre

Nature et Environnement en Nièvre

Declin vertigineux des oiseaux de nos campagnes

Déclin vertigineux des oiseaux de nos campagnes

En cause les pratiques agricoles

 

 

 

En une quinzaine d’années  un tiers des passereaux notamment des oiseaux de plaine ont disparu dans nos campagnes.

-  C’est le constat du Musée National d’Histoire Naturelle (MNHN) qui anime  au niveau national un Suivi Temporel des Oiseaux Communs ( STOC)  dans différents habitats (ville, forêts, campagne… ) et constate une diminution depuis 2001 de 33% des effectifs d’oiseaux vivant dans les milieux agricoles. Déclin qui s’est intensifié en 2016 et 2017 !

-  C’est le constat du CNRS  qui mène depuis 23 ans une étude à l’échelle locale, dans les Deux Sèvres sur un site de 450km2 de plaine céréalière typique des territoires agricoles français.

Il ressort de ces deux études que  le déclin frappe toutes les espèces en milieu agricole, celles qui fréquentent en priorité ce milieu ( alouette des champs, fauvette, bruant ortolan, perdrix ..) comme les  espèces  généralistes qu’on retrouve dans  tous les types d’habitats  et qui elles ne déclinent pas au niveau national (merle, mésange charbonnière, pigeon ramier, pinson…).

La diminution se produit à des vitesses différentes selon les espèces : alouette des champs – 35%,  perdrix de 80 à 90%  elles sont pratiquement décimées. Globalement elle est lente  et progressive, elle est généralisée à l’échelle nationale et européenne.

 

En cause : les pratiques agricoles qui conduisent à la disparition des insectes

 

Les oiseaux des plaines agricoles sont essentiellement insectivores, les insectes sont donc à la base de leur nourriture et ils sont en train de disparaître.

 

L’intensification de l’agriculture ces 20 dernières années est la cause principale de ce déclin.  Elle  conduit à une homogénéisation des milieux (grandes monocultures) où ils ne trouvent plus leur nourriture et à une perte des habitats semi-naturels où ils se protègent et se reproduisent. A cela deux causes principales :

-► la régression  des prairies naturelles, des mares, des haies, des murets liée à la disparition de l’élevage, la fin des jachères obligatoires imposées par la PAC (et rémunérées…). Il y a quelques années  on a vu ça et là des jachères florales  qui avaient pour but d’améliorer la qualité du paysage, enrichir globalement la biodiversité notamment des insectes par la diversité de leur flore. J’ai constaté dans mon secteur (Béard) qu’elles disparaissaient l’année suivante !.  Cette absence de stabilité dans le temps les privait à mon avis d’intérêt.

Rappelons aussi  que les agriculteurs  pouvaient utiliser les jachères (PAC)  en cultures énergétiques (pour le biocarburant) donc intensives .. qui n’ont aucun intérêt pour la biodiversité ! L’objectif de ces jachères n’était pas de préserver la biodiversité mais de diminuer la production agricole destinée à l’alimentation (humaine ou  animale)

 

-►  et l’ utilisation à grande échelle de l’agrochimie : les pesticides ( herbicides qui tuent la flore, généralisation des insecticides  ( dont les  néonicotinoïdes  et leur impact sur les pollinisateurs).

Les pesticides entraînent deux conséquences, la première est une intoxication directe des oiseaux par l’ingestion des graines traitées ( constatée par une étude de l’office de la chasse) la seconde est   un manque de nourriture en raison d’une diminution dramatique des insectes. Une étude allemande  d’octobre 2017 montre que 75% des effectifs d’insectes ont disparu Outre-Rhin depuis 1989 !. La situation n’est pas meilleure en France avec  une diminution de même niveau depuis le début des années 1990.

L’excès d’engrais favorisent l’envahissement des milieux par les espèces qui  en tirent le mieux profit (orties, chiendent, oseilles). L’appauvrissement de la flore entraîne un appauvrissement de la faune.

 

 

95% de l’agriculture française reste conventionnelle.  Elevages et polyculture sont en diminution. Elle continue à privilégier quelques variétés très productives mais sensibles, à augmenter les surfaces des exploitations  pour exploiter un matériel toujours plus puissant. Des choix qui impliquent un usage massif de pesticides. Et la majorité  des aides vont à ce type d’agriculture  (destructrice et coûteuse- plus de 1 milliard pour la dépollution des eaux des pesticides et nitrates…) au lieu de favoriser les pratiques de nature à la transformer  pour aller vers des systèmes durables.

 

 

Quels oiseaux  sont en danger ?

 

Principalement des passereaux comme l’alouette des champs qui nidifie au sol et qui trouve sa nourriture en fouillant la terre ; espèce emblématique des oiseaux  des milieux agricoles elle est « quasi menacée », le bouvreuil pivoine (dernier vu dans mon jardin en 1991 – friand des bourgeons des pêchers….), la linotte mélodieuse, le chardonneret élégant, le serin cini  leur déclin est lié au recul des jachères, des chaumes hivernaux (sites de nourriture), l’outarde canepetière  qui a perdu 60% de ses effectifs   est en « danger », la bécassine des marais est « en danger critique » il reste  50 individus !

 

La liste  nationale des oiseaux en danger est longue…voir sur https://inpn.mnhn.fr/docs/LR_FCE/UICN

 

Alors que fait-on ?

 

La semaine dernière   Frédérique Tuffenel, députée LREM, a interpellé  Nicolas Hulot sur les chiffres  de la disparition des oiseaux. La réponse du ministre a  annoncé qu’il allait présenter dans les semaines à venir un plan biodiversité faisant suite à  « la stratégie nationale pour la biodiversité * » ajoutant « mais sincèrement  tout le monde s’en fiche à part quelques uns.  Je veux un sursaut d’indignation….derrière la sixième  extinction de la biodiversité, la responsabilité c’est nous. Plus on réduit la biodiversité plus on réduit nos options pour faire face à l’avenir..  »

 

          * La stratégie nationale pour la biodiversité est la concrétisation de l’engagement de la France au titre de la convention sur la diversité biologique ratifié en 1994.  Un premier plan  2004-2010 fixe un objectif : stopper la perte de la biodiversité d’ici 2010… ! Il sera révisé en 2010 par un nouveau plan 2011-2020.  Le troisième annoncé par N. Hulot devrait donc donner  lui un nouveau souffle ! nous y reviendrons. Apparemment  il se sent bien seul au milieu du gouvernement Macron d’où son coup de gueule devant les élus de la nation !

 

 

S’agissant des oiseaux  Le CNRS et le Museum soulignent que  cette situation n’est pas encore irréversible mais qu’il devient urgent de travailler avec tous les acteurs du monde agricole, pour accélérer les changements de pratiques ».

Le ministre de l’agriculture pour l’instant ne semble rien avoir à dire sur le sujet. Il est vrai qu’il fait souvent arbitrer ses choix par  la FNSEA tenant de cette agriculture qu’il faudrait changer….en toute urgence…..

 

 

Les solutions d’une agriculture plus respectueuse de l’environnement, de la nature et de la biodiversité  existent,  agriculture biologique  qui exclut les produits chimiques de synthèse, agriculture intégrée, de haute conservation, à haute valeur environnementale (HVE)… qui visent à la réduction des pesticides, des antibiotiques de la consommation d’énergies fossiles.  Et enfin  l’agro-écologie  qui permet de réduire les intrants en travaillant en intelligence avec la nature, d’assurer la fertilité durable des sols, le respect des écosystèmes, de meilleurs rendements et qui favorise une agriculture locale et durable..L’agroécologie est à la fois une philosophie et une pratique.

 

 

L’objectif de S. Le  Foll dans son plan agro-écologie lancé en 2012 (inscrit dans la loi d’Avenir pour l’agriculture et l’alimentation 13 octobre 2014) était de faire de la France le leader mondial de ce modèle de production  articulant performances économiques, sociales et environnementales. On en est encore très  loin … même si de plus en plus d’agriculteurs s’engagent dans des voies nouvelles plus respectueuses de l’environnement. S’agissant problème des pesticides, le CNRS dans les deux Sèvres travaille sur 400 exploitations incitées à limiter leurs apports en intrants et  pesticides.  Résultat : « le revenu des céréaliers peut être augmenté de 200€ hectare de blé en divisant pas deux la quantité d’herbicide et d’engrais ».L’INRA à Dijon qui suit le réseau Delphy -3000 exploitations engagées dans cette réduction) aboutit à la même conclusion « Dans les trois quart des cas, la profitabilité n’a pas été réduite.  On pourrait diminuer de 30% les épandages sans impact économique négatif » .

 

Nombre d’agriculteurs restent encore prudents et réservés à l’égard de l’agro-écologie. Remettre en cause profondément  des méthodes de production en cours depuis des décennies n’est pas aisé. Ils n’y sont pas encouragés par leur syndicat majoritaire la FNSEA pour qui le sujet du moment ne semble pas être l’agroécologie : elle  y voit un retour en arrière sans prise en compte de la viabilité économique. ... La même FNSEA  qui nous abreuve de beaux discours (cf article précédent) est vent debout contre une réforme de la  future PAC (post 2020) favorable à l’environnement, alors que la réorientation des aides PAC est indispensable pour accompagner la transition vers l’agro-écologie.

 

Elle ne se fera pas non plus sans une implication de l’ensemble de la filière  alimentaire, agriculteurs,  transformateurs, distributeurs ( grandes surfaces et  partenaires locaux) sans oublier les consommateurs/citoyens qu’ils faut informer sur ces pratiques plus vertueuses, puisque leur comportement alimentaire  et leur choix d’achat favorise ou non telle ou telle évolution. Ni sans un renforcement de la formation de tous ces acteurs de la chaîne et sans un accompagnement des agriculteurs dans cette phase de transition face aux risques économiques.

 

L’agriculture occupe 28 millions d’ha sur les 55 millions que compte notre territoire. La richesse de la diversité biologique dépend fortement de la manière dont la terre est cultivée. Son déclin est dû en grande partie  l’agriculture industrielle; les études récentes montrent que les oiseaux paient un lourd tribut à cette évolution, (mais cela rappelle que c’est toute la biodiversité qui est en danger).

 

Il n’y a plus que la FNSEA pour ne pas voir que sans un changement de grande ampleur, l’agriculture qu’elle soutient est sans avenir. Les agriculteurs eux, devraient avoir assez de bon sens pour comprendre qu’ils seront une fois de plus les premières victimes de la disparition des pollinisateurs et de la micro faune présente dans les sols !.

Quant à nous il n’est que d’imaginer un printemps sans oiseaux pour mesurer ce que nous perdrions !

 

                                                   J. Thévenot                  

 

 

 

http://vigienature.mnhn.fr/page/suivi-temporel-des-oiseaux-communs-stoc

indicateurs annuels sur l’abondance des espèces

 

► Vous avez le bonheur d’avoir un jardin, pensez à participer aux inventaires vous aurez la joie de découvrir les richesses de votre petit domaine, d’élargir vos connaissances en matière d’écologie et de biodiversité ; vous ferez œuvre utile en apportant des données aux scientifiques 

Sur LPO 58   www.faune-nievre.org

Sur le site du  MNHN : observatoire de la biodiversité des jardins : www.obj.mnhn.fr 

 

http://agriculture.gouv.fr/quest-ce-que-lagro-ecologie

 

 

 

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 Alouette

 

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 Outarde

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 Le bruant

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 Perdrix rouge

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



31/03/2018
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