STOP LGV-POCL-cahier d'acteur Association de protection du confluent
Cahier d'acteur de « l'association de protection du confluent Loire Allier »
La LGV POCL n'a pas d'utilité
Notre cahier d'acteur se veut une critique et un refus du projet de LGV POCL, mais aussi une proposition d'alternative raisonnable, démocratique, respectueuse des populations et de la nature. Il se place en contradiction avec l'idéologie du progrès issue des années 1960, dont la grande vitesse, le TGV, ainsi que les infrastructures gourmandes en énergie, sont le pur produit. Nous devons changer de perspective. Nous nous interrogeons sur l'offre de transports rapides qui provoque un accroissement des déplacements sur des distances de plus en plus longues et un gâchis énergétique. Les mobilités engendrées ne sont pas synonymes de liberté accrue, mais sont une contrainte imposée par la mise en compétition de territoires éloignés.
Face aux crises et dettes écologique, financière, économique, sociale qui nous menacent, nous plaidons pour un nouvel imaginaire social de transition post pétrolière, post nucléaire, post-carbone, qui exclut la grande vitesse et les LGV. Le temps du débat public, qui doit être celui de la réflexion sur les infrastructures de demain, doit s'ouvrir à la compréhension du monde en changement. C'est à cette condition que la nécessaire diminution de notre empreinte écologique nous permettra de maintenir un réel niveau de confort équitable.
La question de la grande vitesse :
La question de la grande vitesse doit être posée. A quoi et à qui sert-elle ? Sur autoroute, sur route, en ville, la vitesse a été réduite, alors que cela paraissait impensable il y a quelques années. La Chine un des leaders mondiaux de la grande vitesse a réduit celle de ses TGV. Pour certains pays, à 200 km/h, on est déjà dans la grande vitesse ferroviaire. Derrière la grande vitesse se profilent des problèmes de sécurité, d'usure plus rapide des voies, de consommation énergétique accrue, de distorsion et de concurrence entre les territoires. Nous savons qu'il faudra trouver un palier d'équilibre dans la vitesse des trains, comme cela s'est fait avec l'automobile et l'avion. Dans les années 1960/1970, la vitesse supersonique du Concorde était un acquis. On voit ce qu'il en est advenu.
Des mobilités subies
Il ne s'agit pas de remettre en cause la mobilité des personnes, puisqu'elle répond à des besoins légitimes, mais de la comprendre et de la raisonner. Il y a des mobilités utiles, agréables (amis, famille, profession, loisirs), mais aussi des mobilités subies, contraintes qui elles, sont provoquées par la grande vitesse :
L'accroissement de l'offre de transports par la vitesse, pousse les gens à aller toujours plus loin pour trouver ce qu'il y aurait près de chez eux en termes de services, de commerces, de travail. La durée moyenne quotidienne des trajets domicile travail est supérieure à deux heures. Il y a maintenant des milliers de personnes du Mans, de Tours, de Lyon, de Reims, … qui chaque jour vont travailler à Paris et inversement. Cela entraine pour eux de la fatigue, génère chaque année des millions de voyageurs-km inutiles, des dépenses énergétiques superflues.
Un gaspillage de temps et d'énergie
L'offre de transport par des vitesses accrues provoque aussi la concentration, la délocalisation des activités vers les métropoles les plus importantes. Nous voyons maintenant des entreprises offrir des services de proximité à plusieurs centaines de kilomètres. Les exemples ne manquent pas où tel architecte, avocat, … de Paris possède des clients à Montpellier, Avignon, … et inversement ceux de ces villes essaient de se frayer une place dans la capitale. La spirale de la spécialisation et du déménagement des territoires est ainsi enclenchée, toujours dans le sens de celui qui possède la plus forte attractivité et le plus fort potentiel. Ce phénomène provoque alors une demande de déplacement sur des plus grands parcours dans un temps réduit. Par une délocalisation, une satellisation, la grande vitesse appelle toujours plus de grande vitesse. Devant ce constat on arrive aux limites du supportable. Notre société devient malade du gaspillage de son temps.
Les infrastructures ne génèrent pas d'activité
Quelle est cette attitude qui consiste à prendre une carte et à tracer des voies de communication en tous sens au prétexte qu'il y a du vide et en évoquant des mots passe-partout que sont désenclavement, attractivité, développement, aménagement du territoire ? Les infrastructures répartissent les activités, elles n'en sont pas la genèse. Si le territoire ne possède pas ses propres compétences, savoir-faire, atouts, ou ne sait pas les mettre en valeur, l'infrastructure peut avoir l'effet inverse de celui escompté. Le passage de la LGV n'a rien apporté de plus à des villes comme Vendôme, Macon, …
L'aménagement du territoire passe par l'organisation des bassins de vie et de leurs activités, … et non par le placage d'infrastructures de grande vitesse qui polarise et les met en compétition, au profit des plus forts. Nous en appelons à plus de cohérence dans les politiques publiques de transport. Actuellement air, route, rail sont subventionnés pour aboutir à un gâchis d'inter-concurrence anarchique.
Des impacts environnementaux mal évalués :
34% des GES proviennent des transports, dont 90% du transport routier. L'action prioritaire passe par la réactivation du fret ferroviaire, la création, la restauration de lignes de proximité, pour un report de la voiture vers le train dans les liaisons intra et inter départementales. Pourquoi se focaliser sur une concurrence de l'avion par le TGV, puisque les gains sont minimes ? Le report modal de l'avion vers le TGV ne sera au maximum que de 8%. Il faudra de 15 à 20 ans pour compenser les GES émis par la construction de la LGV. En 2040, il sera trop tard, pour réduire le changement climatique et devant la raréfaction du pétrole et son coût, cette concurrence avion/ train ne sera plus de mise. Le problème de la consommation énergétique due à la grande vitesse n'a pas été évoqué. Les quantités d'électricité demandées nécessiteront le maintien de centrales nucléaires qui posent un gros problème environnemental et de sécurité sur le long terme.
La réalisation de la LGV entrainerait une disparition de terrains agricoles et naturels, un impact considérable sur les cours d'eau. Elle sectionnera le territoire, détruira irrémédiablement les espaces vitaux au maintien de la biodiversité et des trames vertes et bleues qu'il sera impossible de compenser.
Remise en cause de la saturation de la LGV Paris Lyon :
Selon le dossier de RFF, le nombre de voyageurs entre Paris et Lyon devrait augmenter de 72% sur les vingt cinq prochaines années. Cette projection se place dans une hypothèse du toujours plus de déplacements, comme si une certaine tendance devait se poursuivre. Une présentation de l'évolution au cours des dix dernières années aurait montré les inflexions actuelles. Or nous sommes dans un monde en mutation, qui devra s'économiser pour réduire son empreinte écologique. Il aurait fallu dresser d'autres hypothèses en fonction de ces nouvelles donnes, ce qui n'aurait pas manqué d'aboutir à une révision à la baisse de la projection faite. L'autorité environnementale dans son avis sur le SNIT donne une augmentation globale de 50% de voyageurs en 30 ans. Le rapport Mariton (rapporteur de la commission des finances de l'assemblée nationale) remet en cause, à la baisse, les prévisions de trafic de RFF sur les lignes réalisées.
Dans une note de 2002, Mr A. Sauvant (ENPC) indique qu'il existe de grandes réserves de capacité sur les LGV existantes. Celle de Paris Lyon, par l'augmentation de l'emport, de l'évolution de la signalisation, par une tarification plus sélective, pourrait accueillir quatre fois plus de voyageurs. Le Japon fait circuler 4 fois plus de voyageurs sur une LGV. Les TGV inter-secteurs qui passent par Paris sont aussi une cause de trafic qui pourrait être évitée par un report sur des lignes transversales modernisées.
Paris Clermont Ferrand en deux heures ??
Sur quoi se base cette demande exprimée dans le SNIT ? Est elle raisonnable ? Y a-t-il tant de voyageurs entre ces deux villes pour cette exigence ? Est ce si vital pour l'économie de l'agglomération clermontoise, alors que les échanges se font plutôt sur Lyon, vers le sud et l'ouest ? Cette exigence nous parait démesurée alors qu'une modernisation de la ligne actuelle, sans création de barreau grande vitesse, permettrait de relier Paris à Clermont Ferrand aux environs de 2h30.
Améliorer la desserte de Bourges et des villes du grand centre.
Il apparaît que les élus demandent une irrigation ferroviaire fine du grand Centre, des villes moyennes jusqu'aux plus petites, ce que n'apporte pas la LGV. Certes, ils veulent aussi des radiales depuis Paris, mais le gain de 10, 15, 20 mn est il aussi vital sur des liaisons entre Paris et Nevers, Bourges, Moulins, …? Il n'y aura jamais de liaisons TGV directes entre Paris et ces villes. Un comparatif du temps indiqué par RFF sur des liaisons entre ces villes et Paris de gare à gare centrale, avec ceux d'une ligne actuelle modernisée, montre qu'on obtiendrait des écarts de 10 à 20 mn, selon les tracés. Ces écarts peuvent ils justifier une dépense de plusieurs milliards ?
Les nouvelles LGV une conception dépassée :
Des interrogations arrivent de toutes parts chez les spécialistes du transport ferroviaire sur la pertinence de la poursuite de la grande vitesse. (TGV : le temps des doutes- Y. Crozet-LET, rapport Terra Nova- pour une mobilité douce, …). Le SNIT, rapidement élaboré dans la suite du Grenelle, certainement influencé par les grandes sociétés de TP en alternative au tout autoroute, mais sans réflexion sur la faisabilité financière, sur la cohérence, l'optimisation globale du réseau, ne sera pas tenable. Il sera probablement revu lors de sa discussion parlementaire. Le fétichisme du TGV rend aveugle. Les LGV sont des gouffres dont le financement est hors de notre portée. Sur POCL, avec un financement de 10 à 15% de RFF, de 30 % de l'Etat, il restera aux collectivités à trouver le complément. Le partenariat public privé ne fait que retarder l'apport de la collectivité. Comme le prix du billet n'équilibrera pas les coûts d'exploitation et de construction, c'est bien l'ensemble des contribuables qui paieront au profit d'une minorité.
Extrait du discours de Mr Pépy, président de la SNCF, en avril 2011 :
" le TGV c'est formidable, mais de grâce, mieux vaut arrêter d'en faire une religion et de vouloir couvrir la France de nouvelles lignes à 80 milliards d'euros au nom du progrès et de l'égalité. Trop de TGV risque de précipiter à grande vitesse la faillite du rail".
Des alternatives plus adaptées au besoin
Nous pensons qu'il faut approfondir la complémentarité entre les TER et les trains grandes lignes actuels pour obtenir un maillage diffus du grand centre dans un esprit de coopération entre ses différentes composantes, pour que chacune d'entre elles puisse faire vivre ses services de proximité. Cela passera, par une rénovation, une modernisation du réseau actuel, sans création de barreau grande vitesse, par la création de lignes de proximité ou remise en service de lignes abandonnées. Le train doit trouver sa vitesse limite d'équilibre dans un réseau performant, optimisé, de qualité. Nous bénéficions encore de dix à quinze ans de pétrole peu cher. Profitons en pour préparer l'avenir en trouvant une véritable alternative, économe aux transports routiers, voitures et camions.
Conclusion
Le projet de LGV POCL ainsi que ses objectifs fixés par le SNIT n'ont plus leur place devant les mutations que nous devons opérer. Les quelques années qui restent avant le changement climatique, la fin du pétrole bon marché, l'aggravation de la perte de biodiversité devraient nous inciter à changer le logiciel de pensée économique devenu inadapté et nous inviter à préparer ces bouleversements. Dans ce cadre, bien réel, la LGV POCL n'a aucune opportunité.
Ce cahier d'acteur est publié sous le numéro 30 sur le site
www.debatpublic-lgv-pocl.org - rubriques: participer, proposer un cahier d'acteur,consulter les cahiers d'acteurs
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