Agriculture-accord de libre-échange UE/Mercosur
Agriculture-accord de libre-échange UE/Mercosur
Le Mercosur est le marché commun de 5 pays d’Amérique du Sud (Brésil, Argentine, Paraguay, Uruguay, Bolivie). Sur le plan international c’est le quatrième bloc économique de la planète après l’*Alliance Asie, l’Aléna, l’Union européenne, avec en son sein un géant agricole, le Brésil .1er exportateur mondial de soja, sucre, café,1er fournisseur mondial de viande bovine (élevage sur fond de déforestation et d’hormones de croissance), de poulets (dopés aux antibiotiques), maîs (traité à l’atrazine), qui mise massivement sur les cultures OGM transgéniques et les pesticides (1er consommateur au monde)….
En discussion depuis 25 ans…Les négociations s’accélèrent depuis quelques semaines sous l’impulsion de l’Allemagne, de l’Espagne et de la C° européenne qui voudrait qu’il soit signé d’ici la fin de l’année..
Ce projet de traité s’inscrit dans la logique des accords de libre –échange, augmenter par l’abaissement des barrières douanières, les échanges commerciaux au motif que cela bénéficierait aux parties qui vont commercer et confier aux marchés internationaux (et aux entreprises qui vont avec) l’organisation de ces échanges.
Concrètement compte-tenu de la puissance agricole et exportatrice du Mercosur celui-ci gagnerait sur l’exportation des produits agricoles et le renforcement de cette spécialisation, notamment de l’agro-industrie. Pour l’UE c’est dans l’exportation de produits industriels que des gains sont attendus, auquel s’ajoute l’espoir de diversifier ses approvisionnements en matière de minerais essentiels à la transition écologique comme le lithium, le cobalt, le graphite, utilisés dans la construction des voitures électriques.
Ce traité n’est effectivement pas qu’agricole. Il concerne l’industrie automobile, la chimie, le secteur pharmaceutique, le textile, les services.
Les agriculteurs français sont vent debout contre la ratification de ce traité qu’ils qualifient d’accord « viande contre voitures ». Pour l’UE à l’exception du vin, de l’alcool, de certains produits laitiers, les perdants de ce traité seront les productions fortement soumis à la concurrence internationale, élevage, polycultures à qui on demande à la fois d’être compétitifs sur les marchés internationaux et de réaliser une montée en gamme de leur production.
Ils dénoncent la distorsion de concurrence entre l’UE et le Mercosur où les règlementations tout au long des chaînes de production sont faibles par rapport à celles de l’UE : pesticides, limites maximales de résidus, antibiotiques, traçabilité, contrôle de la déforestation dans la production bovine, bien-être animal (méthode d’élevage, transport) normes sanitaires et phytosanitaires, droits des travailleurs….Ce qui engendre à l’arrivée sur le marché européen, des denrées qui ont des coûts de production inférieurs à ceux en vigueur dans l’UE qui déstabilisent le revenus des agriculteurs européens.
Ce projet de traité porte sur l’importation dans l’UE par an sur 100000 tonnes de sucre, 180000 de poulets, 99 000 tonnes de viande bovine (notamment sur des morceaux de qualité ) sachant que 200000T/an sont déjà importées à des conditions d’accès préférentielles.
Cette concurrence déloyale est déjà une réalité aujourd’hui ( le Mercosur n’étant pas en vigueur n’y est pour rien), c’est le fruit de tous les accords de libre -échange passés depuis trente ans. Outre l’opposition au Mercosur qui rajouterait une pierre à l’édifice, c’est à un réexamen complet de l’ensemble des contrats de libre-échange qui soumettent l’agriculture, l’alimentation à l’agro-business international qu’il faudrait procéder !
Les agriculteurs réclament des «clauses miroir » qui conditionneraient les importations agricoles du Mercosur au respect des mêmes normes de production que l’UE impose aux agriculteurs travaillant sur son territoire. Le projet d’accord ne comporte qu’une clause miroir concernant l’accès au marché européen celle relative aux poules pondeuses pour l’importation des œufs coquille.
Les « clauses » miroir » sont à distinguer des « mesures miroir »adoptées de manière unilatérale par une seule partie et dans le cadre d’une législation sectorielle, qui s’applique avec ou sans accord de libre- échange, à tous les volumes importés exemple l’interdiction d’importer dans l’UE du bœuf aux hormones : en octobre 2024, le Brésil a interrompu ses exportations de viande bovine vers l’UE. Un contrôle effectué par la Commission durant l’été a mis en évidence la présence de résidus d’hormones de croissance.
L’introduction de nouvelles « clauses miroir » dans cet accord implique donc l’accord du Mercosur. Elles doivent être établies produit par produit, se pose le problème de leur efficacité : moyens de contrôle aux frontières et contrôles alimentaires, sanctions.
Mais surtout, l’Europe ne conçoit pas ces contrats bilatéraux comme des leviers pour exporter ses normes de production agricole et que soient liées les questions environnement/commerce. Son seul but est d’augmenter les échanges commerciaux à l’échelle de la planète y compris les produits agricoles cultivés chez elle….considérant que c’est bénéfique pour les consommateurs et bon « globalement »pour sa prospérité… Le tout se faisant en partie au détriment des agriculteurs considérés comme une variable d’ajustement.
Pour une fois on voit la classe politique française soudée derrière ses agriculteurs (dont la colère au passage, dépasse le seul rejet de ce texte).
Président la République, premier ministre, ministre de l’agriculture ( qui a réaffirmé que la France n’était pas contre les accords de libre-échange), parlementaires ont clamé leur opposition à cet accord « en l’état » du texte… ce qui sous-entend qu’avec des aménagements il pourrait passer…..
La France entend bloquer la signature de cet accord, ce qui implique de pouvoir réunir au sein du Conseil européen une minorité de blocage soit quatre Etats représentant au minimum 35% de la population de l’UE.
En cas d’échec restera le Parlement européen dernière instance européenne à laquelle le texte sera soumis au vote, ce qui suppose également un ralliement suffisant d’autre pays.
Ce projet d’accord non défendable « en l’état » ne le serait pas d’avantage avec des améliorations (très hypothétiques à ce jour…). Il encourage un modèle agricole mortifère .
Ce traité (d’une autre époque !) qui inclut l’agriculture, dans un accord qui fait du commerce une fin en soi, est à rejeter. Il valide la stratégie de la spécialisation alors qu’il faut diversifier les productions agricoles pour sortir des dépendances alimentaires, il entraîne une augmentation des importations de viande et autres produits agricoles et avec eux des émissions de CO2, de la déforestation, de la contamination des sols, des violations de droits humains (salaires des travailleurs, spoliation des peuples autochtones) et met en péril les moyens de subsistante des agriculteurs locaux de l’UE et du Mercosur.
Il y a une question qui n’a pas été posée au cours de ces semaines où le Mercosur a tenu la vedette dans les médias, celle du « modèle agricole »français. Et que dire de nos exportations qui déstructurent les marchés locaux du Sud : bas morceaux de volailles exportés notamment en Afrique, dont les consommateurs européens ne veulent pas, sous- produits du lait (poudre qu’on engraisse avec de l’huile de palme)….
Reconnaissons nous à tous ces pays du Sud déstabilisés par les exportations européennes et françaises qu’ils puissent mettre en place eux aussi des mesures de protection de leurs marchés agricoles ? La réponse est dans la question !
J.Thévenot
a
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