DECAVIPEC - PROJET DE SARDY-LES-EPIRY
Projet de Sardy-les-Epiry
Une Wood-Valley
ou
une catastrophe écologique et économique ?
Après le projet de La Machine, peut-être moribond, on pouvait espérer un sursaut de bon sens dans le programme de Sardy-les-Epiry.
Las, après une étude sérieuse et difficile des 5 classeurs du dossier et sans a priori, les associations Loire-Vivante et DECAVIPEC rendent leur verdict : le projet est mal monté : nombreuses insuffisances et contre-vérités, localisation désastreuse, plus grave le financement est pour le moins douteux. La Nièvre continue à être le réceptacle de projets rejetés ailleurs.
Historique
Le site choisi s'appelle «le bois de Tronçay», d'une surface de 110 ha, bordé d'un côté par l'Yonne et de l'autre par la rivière de Sardy et le Canal du Nivernais. Nous sommes à quelques dizaines de mètres du Parc Naturel du Morvan, le hameau de Marcilly surmonté de son château du XVème inscrit à l'inventaire des monuments historiques et ayant appartenu à la fille du Maréchal de Vauban, se trouve aux premières loges.
La société belge Fruytier ayant un projet d'installation d'un pôle bois en Bourgogne, la communauté de communes du Pays Corbigeois fait l'acquisition auprès d'un groupement forestier de ce bois peuplé de chênes et de charmes. Acquisition pour un prix qui serait de trois fois sa valeur (1 million d'euros … empruntés !). Pourquoi ce prix trop élevé ?
L'entreprise Fruytier visite le site et leur conclusion est sans appel : le défrichement total du bois serait une catastrophe écologique, les infrastructures routières, ferroviaires sont insuffisantes, absence de lignes à haute et moyenne tension, apport d'eau problématique etc … Fruytier, aidé par le Conseil Régional de Bourgogne s'est installé à quelques dizaines de kilomètres, à La Roche-en-Brénil en Côte d'Or, sur une zone industrielle conçue pour ses activités : électricité, A6 et N6, transport ferroviaire et à la porte du Morvan, sans impact sur l'environnement.
La Communauté de Communes de Corbigny est aux abois financièrement, il y a urgence à trouver un autre porteur de projet. Pascal Jacob (par ailleurs président du MEDEF de la Nièvre et de la région Bourgogne) faisant partie du groupe belge IBV est présenté aux élus comme le «Messie» pourvoyeur d'emplois. Précipitamment on monte un dossier de sciage, de production de chaleur et d'électricité et de fabrication de granulés de bois, on annonce même une production de matériaux d'éco construction. Problème : le dossier est «retoqué» aux différents appels d'offre du Ministère : pas de rachat d'électricité à des prix rentables. Aucune importance, Mr Jacob diminue la capacité de sa chaudière : 12MW au lieu des 24 prévus initialement, mais il est toujours retoqué aux CRE3 et CRE4. Tant pis on continue … Entretemps, des dispositions particulières à l'électricité produite par la biomasse ont été prises début 2011. Ce qui n'apparaît pas dans le dossier en enquête publique.
Au mois d'août 2011, grande annonce dans le journal communautaire corbigeois : le défrichement total du bois de Tronçay commence en septembre, les pelles des bulldozers sont prêtes à raser complètement le site.
Les élus avaient «oublié» qu'un défrichement de 110 ha était obligatoirement soumis à autorisation. Les bulldozers attendent et cette procédure s'est ajoutée à l'enquête publique (du 2 novembre au 16 décembre 2011) de demande d'autorisation de l'installation et d'exploitation d'une scierie, d'une cogénération, d'une production de pellets (granulés de bois) sur 60 ha, de l'aménagement de 56 autres ha d'une zone industrielle. La production de matériaux de construction a complètement disparu du programme projeté.
Le projet en questions
IBV, déjà implanté en Belgique (à Vielsam) a vu son 2ème projet le long de la Meuse refusé, il décide de se tourner vers la France et précisément la Nièvre plus «hospitalière» et moins regardante sur l'environnement apparemment. Pascal Jacob (également ancien président de Fibre Active et ancien dirigeant de la société POBI à La Charité-sur-Loire), trouve un investisseur de la filière bois avec lequel est créée la société ERSCIA (dont il devient le directeur) qui porte ce projet d'une grande ampleur. Le maître d'ouvrage du lotissement de zone industrielle est la société Nièvre-Aménagement. L'organigramme de ce groupe complexe, dont fait partie ERSCIA, montre que le principal actionnaire (75%) est la société JOST transporteur routier notamment de grumes. Toute la gestion financière est localisée au Luxembourg, il en résulte que le chapitre «capacités financières» du projet est résumé par «aucune ressource financière propre …». Plus flou on ne peut mieux trouver !
Un petit résumé des futures activités sur le site : on apporte des grumes, tout ou partie du bois est scié sur place, on installe une cogénération afin de produire de l'électricité et de la chaleur, en fait c'est une co-incinération au vu de la liste des déchets-combustibles décrite dans le dossier : déchets ménagers à base de déchets verts et biodégradables, bois de démolition peints et vernis, bois de résidus de meubles et placages contenant des colles ! La production de granulés de bois sera exportée en Belgique pour être brûlée dans les centrales thermiques à charbon afin d'abaisser les quotas de CO2 belges. On se pince : on récolte tous les déchets de bois à 170 km à la ronde pour les brûler dans la chaudière de Sardy ou les centrales belges, on récolte les grumes jusqu'à 300 km de rayon. Il est affirmé que ces grumes seront toutes sciées sur place. Nous avons des doutes sur cette affirmation.
Le projet ne présente pas de bilan carbone, on comprend pourquoi ! Comme développement durable et vert on peut faire mieux.
Catastrophe environnementale
Le bois de Tronçay est un milieu naturel à part entière en raison de sa surface (110 hectares), de sa nature (feuillus), de sa situation géographique, seul massif forestier entre Yonne et Canal du Nivernais. Cette forêt représente un enjeu fort pour la biodiversité en raison du nombre d'espèces différentes qui y vivent (amphibiens, reptiles, mammifères, oiseaux nicheurs …) ou qui y chassent (oiseaux, chiroptères). Nombre d'entre elles sont protégées et doivent faire l'objet d'une demande de dérogation afin d'obtenir une autorisation de destruction, concernant les batraciens, reptiles, insectes, chauves -souris (article L.411-1 et s. Code Environnement).
L'inventaire des espèces animales et végétales est volontairement incomplet et nous dénonçons cette tromperie : absence de crapauds (les sonneurs y sont très nombreux), les insectes : omission complète d'espèces patrimoniales, et suivent 5 noms de libellules ! Les associations ont pris contact avec un entomologiste proche résidant : le bilan est stupéfiant. Nous sommes face à un biotope essentiel, les espèces protégées sont pratiquement toutes réunies : coléoptères comme le Grand Capricorne, le lucane cerf-volant, les carabes, scarabées surtout le si connu Pique-Prune, nécrophages bousiers, les lépidoptères nous ne nommerons que le Grand Sylvain en danger de disparition, les hyménoptères chaînon essentiel à la pollinisation. Nous ne pourrons pas énumérer ici toutes les espèces répertoriées, nous rappellerons simplement que le seul Pique-Prune a réussi à faire évoluer des tracés d'autoroute en Mayenne.
Les forêts dotées d'une riche faune saproxylique sont devenues si rares, si éparses, si éloignées, que toute colonisation naturelle est devenue localement impossible. Le bois de Tronçay par la richesse de sa faune fait partie de ces forêts à sauvegarder. La sous-évaluation flagrante de la faune présente sur le site appelle de notre part cette question : les responsables de ce projet ont-ils manœuvré malhonnêtement afin de modifier l'inventaire du chapitre «habitats et faune» ? La réponse est évidente : oui, en faisant l'impasse complète sur l'inventaire des insectes, des crapauds etc. les pétitionnaires trompent le Conseil National de Protection de la Nature, organisme qui permettra l'obtention d'une dérogation à la sauvegarde de ces espèces protégées en Europe ainsi que leurs habitats.
A aucun moment la SEM Nièvre-Aménagement ne s'est souciée de la sensibilité écologique ni du bois ni de tout ce qui l'environne, notamment proximité de ZNIEFF I et II, site situé aux portes du parc régional du Morvan à proximité de sites NATURA, pour lesquels aucune étude d'incidence n'a été fournie.
Les deux associations, LOIRE VIVANTE et DECAVIPEC dénoncent ces manigances illégales et malhonnêtes et mettront tout en œuvre auprès des organismes décisionnels pour stopper cette destruction décidée avec la complicité des élus locaux. Elus irresponsables qui ne voient qu'une promesse d'emplois par une société on ne peut plus nébuleuse
Catastrophe économique
Pourquoi, alors que plusieurs zones industrielles créées près des nœuds routiers et ferroviaires nivernais sont inoccupées, avoir choisi cette localisation inadaptée ? L'acquisition malheureuse et trop chère du bois de Tronçay a rendu sa rentabilité impérative. L'alibi de la proximité du massif du Morvan est douteux puisque le pétitionnaire ira s'approvisionner jusqu'à 300 km et très peu dans ce parc naturel du Morvan (5 % de son approvisionnement). Détruisons, défrichons, dessouchons ! 100 hectares de terre arasée pour accueillir des entreprises aléatoires !
Le problème des approvisionnements en bois n'a pas été posé. L'équilibre économique de ce secteur va être sérieusement impacté par une installation de cette importance : 560.000 m3 de grumes, 900.000 m3 de plaquettes forestières, 275.000 m3 de bois usés, le projet ERSCIA est directement en concurrence avec Fruytier ou Bois et Sciages de Sougy et qu'en sera-t-il pour les plus petites entreprises ? L'approvisionnement se ferait pour 5% en Morvan (alors pourquoi avoir choisi cette localisation qui n'est pas dédiée à l'industrie ?) et 95% dans 8 régions et 26 départements. Outre le caractère anti-écologique de ces déplacements se pose le problème de leurs coûts et de la viabilité économique de ce projet.
Le coût de la création des réseaux nécessaires à cette entreprise, eau, électricité, fibre optique etc … sera à la charge des collectivités donc du contribuable. Le réseau routier est problématique avec ses voies étroites et ses ponts à circulation alternée et déjà encombré par les camions de la carrière Picampoix toute proche. L'entreprise ERSCIA génèrera au moins 200 camions de plus par jour, soit au total un camion toute les minutes et demie devant les riverains et dans le centre ville de Corbigny.
Il est temps de réfléchir sérieusement , d'arrêter ce projet dément pour permettre à d'autres d'émerger, qui soient raisonnables, solides et innovants, qui s'inscrivent réellement dans un développement soutenable et dans la filière bois sur laquelle le Conseil Général travaille depuis des années.
Biosylva
Les associations travaillent actuellement sur un dossier de demande d'autorisation d'installer et d'exploiter une unité de fabrication de granulés de bois sur le territoire de la commune de Cosne-sur-Loire. Le site choisi est le Parc d'activités du Val de Loire. L'enquête publique est ouverte du 2 janvier au 3 février 2012.
L'objectif de ce projet est une production annuelle de 150.000 tonnes de granulés pour une consommation de 280.000 tonnes de matières premières, à savoir des rondins de feuillus. Les produits sont destinés à la vente aux particuliers et à collectivités locales. Il est question d'une trentaine d'emplois.
La localisation (zone AUE) est judicieuse puisque desservie par l'A77 et une voie ferrée voyageurs et marchandises. Le Parc d'activités regroupe actuellement plus de 30 entreprises artisanales, industrielles et commerciales. Le terrain d'implantation est situé entre l'échangeur Cosne-Sud n°23 et la Loire. Des extensions sont envisagées et réalisables notamment pour une scierie, complément de l'activité de Biosylva.
La localisation, les mesures cohérentes proposées et l'analyse complète des impacts réels et potentiels respectent la réglementation en vigueur de l'urbanisme et de l'environnement. Le projet est l'exemple d'un programme raisonné d'autant plus logique qu'aucune activité équivalente n'est implantée dans le département, alors que la demande de ce produit est en augmentation.
Les associations sont lucides dans leur analyse des projets ; elles ont prouvé leur crédibilité et leur neutralité en critiquant des dossiers comme «Gimouille», Prémery (ECOPREM et SNR),la co-génération et les serres de La Machine etc … Où en sont ces projets incohérents, «encalminés» après gaspillage d'argent public ?
Danièle Auclin et Jacqueline Thévenot
Les habitants de Marcilly se mobilisent
A la place du joli bois du Tronçay ils vont avoir vue directe sur ERSCIA , ses bâtiments de 40 mètres de hauteur, sa cheminée de 50 mètres, ses rejets, ses bruits, ses camions....
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