Nature et Environnement en Nièvre

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DECAVIPEC-La terrible leçon de Xynthia

La terrible leçon de Xynthia

 

 

L'hécatombe pouvait être évitée, la tempête qui a frappé la France dans la nuit du 27 au 28 février est exceptionnelle par sa taille et son intensité, les aléas étaient tous réunis pour que 2 départements soient submergés en peu de temps, si peu que les victimes ont péri dans leur sommeil.

 

Préfectures et collectivités locales n'ont pas compris l'importance du risque de la montée des eaux, l'alerte rouge lancée par Météo France dès le 26 février n'a pas été suivie d'effets, aucune évacuation n'a été recommandée ni effectuée.

 

Tous les facteurs étaient réunis.

 

Une très forte dépression due au blocage des vents par l'air froid d'un long hiver, se déplace  très rapidement, coefficient de marée à 102, vents d'ouest  de 130km/h. Ces derniers poussent des masses d'eau accentuant  le phénomène de  « surcote ». La catastrophe est en route ce 27 février 2010.

 

Constructions dans les zones à risque

 

Les lotissements de l'Aiguillon et La Faute-sur-Mer formés de maisons comportant un rez-de-chaussée non surélevé, sont situés  dans une cuvette sur une presqu'île entourée par la mer et l'estuaire du Lay. Seule sécurité apparente des digues construites entre 1926 et 1932. En octobre 2008, la Direction Départementale de l'Equipement (DDE) de Vendée avait établi un pronostic prévisionnel alarmant : « sur de vastes espaces gagnés sur la mer…la conjonction de 2 phénomènes, crue dans l'estuaire du Lay et submersion marine, pourrait avoir un impact très important sur les zones densifiées à l'arrière d'un réseau de digues vieillissant… ». Ce jugement n'est-il pas trop, beaucoup trop tardif ? La DDE a vu passer dans ses services toutes les demandes d'autorisation de permis de construire, pourquoi n'a-t'elle pas réagi avant 2008 ?

 

Zones rouges,  permis de construire et responsabilité

 

Depuis la loi de décentralisation (1982), un maire peut accorder un permis de construire en dépit du principe de précaution malgré le contrôle de légalité a posteriori  exercé par les préfets et les tribunaux administratifs. La tentation est grande par les offres alléchantes des promoteurs et lotisseurs.

 

Seule restriction à ce pouvoir, depuis décembre 2007, l'Etat peut se substituer à lui et décider d'exproprier  en cas de danger avéré. Des Plans de prévention des risques naturels prévisibles (PPR) ont été renforcés. Le Plan de Prévention des Risques d'Inondation (PPRI) est opposable pour toutes les constructions, travaux ou aménagements en milieu inondable*.

Trois zones ont été créées, en zone rouge où le risque est le plus élevé, aucun permis de construire ne peut être délivré même par dérogation. La loi de 1995 est à l'origine de ces Plans, or depuis 1999, 100 000 logements ont été construits en zone inondable sans aucune restriction, ainsi à La Faute-sur-Mer, des lotissements ont été construits entre 2004 et 2006.

Ces Plans   arrêtés par les préfets ont en France un énorme retard, à titre d'exemple sur 864 communes particulièrement exposées au risque de submersion marine, seules 46 disposent de ce document approuvé. La Faute-sur-Mer en est ainsi dépourvue ! Les élus locaux ont retardé sciemment son adoption pour défendre des intérêts économiques ! Le même retard est constaté concernant l'adoption d'un Plan Communal de Sauvegarde, outil destiné à anticiper les situations de crise et qui prévoit, notamment, l'évacuation de la population ! En Vendée 69 communes sont soumises à cette obligation, seules 14 l'ont respectée.

 

Dérogations, retards délibérés, mépris des règlements et lois, urbanisation dans des zones à haut risques, cette cascade de faits a conduit à cette catastrophe.

Au lieu de mettre en point de mire les  digues et seulement celles-ci, on peut accuser le retard du système d'avertissement et d'alerte au risque de submersion le long des côtes françaises, ce système est en place depuis des années en Grande-Bretagne.

 

Tempêtes historiques

 

- Le 15 octobre 1987 des vents force 12 ont détruit en une nuit un quart des forêts bretonnes, par chance le coefficient de marée était limité. 15 morts

- Le 3 février 1990 la tempête « Vivian »frappe le nord de la France, passe par Paris puis la Belgique. 23 morts.

- Les 23 et 27 décembre 1999 2 tempêtes « Lothar et Martin » avec des vents entre 150 et 200 km/h ont fait  92 morts et détruit plus de 500 000 ha de forêt en France puis en Suisse.

- Le 24 janvier 2009, le Sud-ouest de la France est frappé par la tempête « Klaus », une bonne partie de la forêt des Landes est détruite. 12 morts.

 

Aucune digue ne pouvait résister à la crue centennale de Xynthia, la mer a détruit, contourné et passé bien au-dessus de ces ouvrages.

 

De telles séries ne sont pas inédites, l'Europe a connu des ouragans conjugués à de fortes marées tout au long des siècles, désastres humains en Hollande et en Angleterre. Une suite d'ouragans a eu lieu   entre les 14 et 18 janvier 1739 et a dévasté le continent d'ouest en est. Les villages étaient protégés par les marais littoraux et les prés, en vertu de l'ancestral principe de précaution transmis par nos anciens de génération en génération.

 

Les responsables encourent-ils des sanctions ?

 

Un arrêté du Conseil d'Etat établit que la responsabilité de la Commune était engagée si « l'insuffisance de mesures de prévision et de prévention prises par la commune a constitué une faute de nature à engager sa responsabilité vis-à-vis des victimes… ».

Un maire et un préfet peuvent se retrouver assignés devant le Tribunal Administratif en cas de catastrophe naturelle en vue d'obtenir des dommages et intérêts. Et même devant le Tribunal Correctionnel, s'il est prouvé que la loi n'a pas été respectée.

 

Loire-Vivante dans son article « De l'utilité du PPRI quand il n'est pas respecté », explique le non-respect de cette servitude qu'est le PPRi ainsi que les dérogations au PLU, notamment par Monsieur le maire de Decize. Ces fautes ont conduit l'association à saisir le Tribunal Administratif de Dijon. La DDE avait rendu un avis négatif sur un projet mais a omis d'exercer le contrôle de légalité qui lui incombait, sur le permis d'aménagement (remblaiement, dans le lit majeur de l'Aron, zone à aléa fort).

 

                                                                                    Danièle Auclin

                                                                                                                                                                                   

 

 *A lire deux articles de Loire Vivante :

- Réduire le risque inondation : les PPRi

- De l'utilité du PPRi quand il n'est pas respecté



28/03/2010
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